De nombreuses études ont été réalisées sur le mouvement Gothique. Ces études, plus ou moins sérieuses, renforcent ou tentent d'atténuer une image relativement négative de ce mouvement. Mais pratiquement aucune ne s'intéresse aux fondamentaux de cet esprit. En effet, au-delà des codes propres à toute communauté, il existe un lien ténu, presque invisible qui relie les différentes tendances qui se reconnaissent dans l'esprit gothique. Ce lien est une quête, une quête d'un absolu, celui d'une certaine esthétique.
Le propos de ce manifeste n'est pas de réaliser une étude de plus sur ce mouvement souterrain, mais bien de remettre les choses à leur place. Il n'est en effet pas nécessaire de parader tout vêtu de noir, ou d'arpenter les cimetières perdus de nos provinces pour être qualifié de "gothique" ou "goth" selon les appellations. Car certaines démarches, certains comportements, sont bien plus dans l'esprit de ce mouvement que certaines attitudes.
Pour commencer, il faut briser un tabou : oui, le mouvement gothique est élitiste. Elitiste ne signifiant pas que seule une élite à le droit de se prétendre membre de cette communauté, mais qu'à force de travail, d'étude et de réflexion sur certaines valeurs, on parvient à percevoir la réalité de ce mouvement. Mais cette communauté n'a pas de règle, pas de leader, pas de bible. Elle n'est donc pas une secte ou une religion. Elle est seulement un idéal.

Cette quête esthétique peut prendre plusieurs formes, selon la sensibilité de chacun. Certains seront plus sensibles à la musique, d'autres à la littérature, d'autres encore à l'image. Peu importe : ce qui compte vraiment c'est que la démarche soit la même : une recherche de ce qui est Beau.

C'est ce ciment qui relie des personnes aussi différentes qu'un fan de darkwave qui trouvera dans les mélopées électroniques essence à méditer, ou que ce néo-romantique qui s'évadera en lisant les poèmes d'Hölderlin. Par ce regard, il n'y a donc plus d'incohérence. En effet, et tel est le paradoxe (apparent) de ce mouvement, qui base une bonne partie de ses codes sur le visible et l'apparence, le seul et véritable lien qui unit ses participants est invisible.

Mais alors, pourquoi cette noirceur omnipésente ? il est probable qu'il faille chercher un embryon de réponse dans une sorte de réalisme sombre. En effet, les goths sont des êtres sociaux vivant en société et toute société a toujours une facette dégradée, noire et abjecte que les medias refusent quasi-systématiquement de montrer. Le goth va sublimer cette noirceur pour en tirer quelque chose de Beau. Ainsi le noir, couleur usuelle du deuil et de la tristesse dans nos sociétés occidentales est mis en avant comme pour montrer au monde que cette société n'est pas faite que de bonheur ni pleine de paillettes. Les sons lourds et lancinants des musiques d'inspiration gothique nous rappellent ces mélopées funèbres de jadis ou ces bruits industriels, que l'on tente de cacher habituellement. Et ces maquillages singeant la mort sont comme un avertissement à ce monde abreuvé d'images de bonheur artificiel : nous sommes mortels et un jour nous quitterons ce monde.

Le mouvement gothique, ou son ancêtre, le mouvement romantique des années 1850 est donc une réaction réaliste à cet artifice nommé société de consommation. Mais, contrairement aux punks ou autres mouvements qui eux aussi rejetaient ce monde factice, les goths le font avec délicatesse et élégance. Comme s'ils voulaient sublimer cette déchéance.

En un mot, les goths sont des alchimistes tentant d'extraire du Beau de cette boue qui représente notre société. Chacun à leur manière, ils contribuent à faire de ce monde quelque chose de Beau ...

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